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• Suivre un dispositif ULIS en collège

Ulis, l’Odyssée 

Une vidéo proposée qui montre le fonctionnement d’un dispositif Ulis en collège en REP+ à Lyon.

La vidéo a été tournée en période de pandémie, le masque est porté par tous et les déplacements des élèves sont freinés par la limitation du brassage des groupes.

Regards et paroles sur les séances pédagogiques, le vécu des élèves, des enseignants, les difficultés rencontrées et les progrès réalisés.

Une vidéo très intéressante pour tous ceux et celles qui ne connaissent pas ce dispositif et pour confronter les expériences pour les équipes qui travaillent déjà en lien avec une Ulis.

• Y a-t-il une limite à l’inclusion ?

Voilà ce que m’écrivait dernièrement un enseignant :

Je suis enseignant spécialisé en IEM depuis plusieurs années. J’ai occupé les 3 classes qui composent notre UE et j’ai pris la coordination pédagogique depuis cette année dans le but de pouvoir “modéliser” la notion de parcours. Depuis 3 ans maintenant un nombre grandissant de nos jeunes reboucle avec le milieu ordinaire avec des emplois du temps partagés.
La question que je voulais vous poser concerne nos jeunes pour lesquels la scolarité n’est envisageable que dans notre structure. Sans céder au déterminisme j’observe que ces jeunes ne pourront pas se former à un métier. L’orientation qui est plus une passation, une transition se fera en foyer occupationnel.
Comment optimiser une proposition scolaire qui puisse accompagner ce parcours?
En effet il est complexe d’accompagner des jeunes dans des apprentissages alors que la finalité qualifiante ou diplômante ne sera pas une réalité pour eux.
Ce sont de plus des jeunes qui peuvent avoir plus de 16 ans ou plus de 18 ans (à partir de 20 ans l’amendement Creton permet une souplesse pour leur sortie).
Ils sont arrivés non pas à une zone proximale de développement mais à une zone maximale d’apprenant.

Son questionnement nous rejoint chacun là où nous sommes. Il peut être formulé bien différemment, par exemple, j’entends souvent :

  • N’y-a-t-il pas de limites à l’école inclusive ? Peut-on scolariser tous les élèves en établissement scolaire quand le décalage avec les élèves du même âge est trop grand ?
  • Cet élève serait mieux ailleurs ? Dans un établissement plus adapté ?
  • L’école telle qu’elle est peut-elle scolariser tous les élèves et prendre en compte les besoins différents ? N’est-elle pas “nocive” pour ces enfants ?

Ces questions sont légitimes et sont les héritières de l’idée encore présente que l’éducation des enfants les plus vulnérables devait se réaliser dans des lieux à part. A part de l’école, à part dans l’école. Idée semblable qui conduit à penser que certaines personnes en situation de handicap ont besoin de lieux plus protecteurs que le monde de l’entreprise ou même de celui des ESAT ou entreprises adaptées et qu’elles ne peuvent donc pas travailler. L’école ordinaire est parfois considérée comme source de souffrances pour les jeunes par différents professionnels. Le monde du travail jugé trop dangereux, nocif aussi.

Les enseignants, se sentent aussi parfois très démunis, estimant qu’ils n’ont ni les conditions requises pour pouvoir s’occuper plus spécialement d’élèves avec des besoins plus particuliers ; et que d’autre part, ils ne sont pas formés. Certains parents peuvent aussi partager cette idée, car finalement, ces élèves différents, trop différents, risqueraient de faire baisser le niveau de la classe.

Il est vrai que l’école, dans son organisation, son rapport à la norme, le nombre d’élèves parfois trop important par classe, les moyens insuffisants en personnels, n’offre pas le même environnement que celui d’instituts spécialisés.

Les entreprises se sentent aussi prises par des enjeux de compétitivité, de non capacité à se former, à adapter les postes…

Le questionnement de notre collègue se situe dans ce développement du paradigme de l’école inclusive qui repose sur d’autres logiques : environnementale, de droit, de partenariat, d’empowerment. Pour autant, la question de la limite de l’école inclusive est posée. Peut-on scolariser tous les élèves à l’école ? Comment réaliser des inclusions en école pour des jeunes venant d’un institut médico-éducatif, d’un institut d’éducation motrice, quand le décalage dans les apprentissages est si grand et que comme cela est expliqué, la visée pour certains n’est pas une formation professionnelle ? Comment permettre des temps d’inclusion en collège et en lycée quand l’écart entre les possibilités cognitives, et les apprentissages réalisés est trop grand ?

Une des réponses consisterait à se dire que la visée est alors uniquement sociale, mais n’est-ce pas un leurre ? Comment permettre qu’il y ait réelle participation à l’activité proposée ? Cela demande de clarifier précisément ce que cet élève est capable d’apprendre dans ce moment-là, aussi minime soit-il ? Cela demande aussi, une interaction avec les autres élèves, les différentes aides humaines afin d’étayer au mieux (ni trop intensément, ni trop faiblement) la participation à l’activité.

L’autre partie de la question est liée au postulat d’éducabilité cognitive. En regardant en arrière, nous nous apercevons que des élèves, considérés comme incapables d’apprendre à lire si on s’en tenait au diagnostic et à ce qu’on croyait savoir, n’en finissent pas de nous surprendre. Derrière un trouble, de telles diversités sont là et montrent des possibles insoupçonnés. Combien de coordinateurs ULIS disent que l’intérêt de leur poste est en premier de voir les progrès que réalisent leurs élèves ! Combien il est fondamental que chaque être humain puisse toujours apprendre ! Quel que soit le domaine de l’apprentissage et le niveau auquel se situe cet apprentissage. Car lorsqu’il n’y a plus apprentissage en relation avec d’autres, un moteur fondamental de la dynamique humaine se coupe. Mais nous peinons parfois à oser stimuler ou à réaliser que cette personne très vulnérable, cet élève est, de fait, entrain d’apprendre… Peut-on alors parler de “zone maximale d’apprenant” ? Peut-être si nous nous limitons aux seuls apprentissages tels que les définissent les programmes scolaires, ou de formation, mais non,  si nous sommes capables d’élargir l’horizon à tous les champs possibles pour apprendre avec d’autres.

Tous ces éléments témoignent des changements majeurs que nous sommes en train de vivre avec beaucoup de tâtonnement, avec des connaissances qui évoluent, domaine médical, pédagogique, outils numériques…
Nous avançons peu à peu sans avoir tous les moyens, toute la visibilité mais nous pouvons prendre appui sur les progrès réalisés, sur les évolutions de part et d’autre de l’école, du monde spécialisé et de l’entreprise malgré le contexte de nos modèles économiques. L’école inclusive va de pair avec une société inclusive. Les formes de “foyer occupationnel” évoluent aussi : quelle participation sociale peuvent-ils favoriser ? Comment peuvent-ils continuer à stimuler chez leurs résidents les différentes dimensions de leur personne, relationnelle, cognitive, affective, spirituelle, artistique … ?

L’évolution actuelle va nous conduire à mieux articuler les ressources thérapeutiques, éducatives des établissements spécialisés avec les ressources de l’école. Cela devrait apporter de nouveaux moyens à l’école et améliorer ainsi la scolarisation de nombreux enfants. Mais si la volonté politique est là, cela demande de changer nos représentations mutuelles et de travailler ensemble au plus près des besoins de chaque jeune. La circulaire 2015-129 sur les ULIS, précise que l’élève va “autant que de besoin dans le dispositif”. Cette phrase, passée souvent inaperçue, donne pourtant la ligne de conduite à suivre….  Tout en maintenant une réelle place dans le monde de la cité, à l’école ou au travail, dans les lieux de vie non séparés, aménagés, rendus accessibles, respectueux des besoins des personnes les plus vulnérables.

 

 

 

 

 

 

• Dossier de veille IFÉ. Apprendre (dans) l’école inclusive

L’IFÉ ( Institut français d’éducation) offre un numéro très intéressant et très actuel sur les liens entre Apprendre et école inclusive. D’où ce titre avec ce “dans” entre parenthèses qui pose un vrai questionnement.
Aujourd’hui, il n’est plus seulement question de socialisation mais de participation et de construction des apprentissages en s’appuyant à la fois sur une personnalisation du parcours mais en développant aussi une approche collaborative et du co-enseignement.
Catherine Reverdy en est l’auteure.

Voici le résumé de cet excellent dossier :

“L’école inclusive telle qu’elle est présentée dans les textes internationaux a vocation à faire accéder tou.te.s les élèves à une éducation de qualité dans leur école ou leur établissement de secteur. Souvent traduite dans les faits par la scolarisation des élèves en situation de handicap, elle recouvre en réalité toutes les manières possibles, pour les systèmes éducatifs, de répondre à l’ensemble des besoins éducatifs des élèves, quels qu’ils soient.
Ce Dossier de veille de l’IFÉ apporte des éclairages historiques et conceptuels sur les termes souvent confondus d’adaptation, d’intégration, d’inclusion et d’école inclusive, notions dont l’usage est très dépendant des contextes nationaux. Il présente l’exemple de l’Italie, qui sert souvent de modèle aux politiques éducatives françaises sur le sujet, un pays qui a engagé dès les années 1970 une prise en charge du handicap directement dans les écoles. Côté français, depuis le début du XXe siècle, les histoires du traitement à l’école du handicap et des élèves en difficulté sont entremêlées et se partagent entre plusieurs ministères, si bien que les élèves à besoins éducatifs particuliers sont actuellement pris en charge sur plusieurs lieux, où se croisent des cultures professionnelles très différentes.
La mise en œuvre de l’école inclusive dans les classes reste donc difficile, parce qu’elle entraine une coopération indispensable entre des intervenant.e.s ayant chacun.e des représentations et un regard particulier sur les élèves et leurs besoins, dévoilant l’équilibre toujours fragile entre l’intérêt collectif de l’école inclusive et les intérêts parfois divergents d’élèves toujours singuliers.”

Le dossier 127/ janvier 2019.