Archives de l’auteur : Véronique Poutoux

. Les groupes de niveaux ne sont pas compatibles avec l’école inclusive.

La réforme phare présentée sous le mandat de Gabriel Attal  collecte de nombreuses critiques venant d’horizons différents: organiser les enseignements de français et Maths en classe de 6eme et 5eme en groupes de niveaux. Les intentions sont affichées : permettre aux bons élèves d’aller plus vite et mieux accompagner les élèves en difficulté

Notre nouvelle ministre, après de nombreuses consultations semble vouloir modifier le discours en utilisant le terme de groupes de besoins flexibles, en ouvrant la possibilité de dérogations en fonction des contextes et sous la responsabilité des chefs d’établissements et des équipes. Mais peut-elle piloter son ministère ?

Ce retour en force d’idées anciennes sur le plan pédagogique et éducatif est en contradiction avec la visée d’une école inclusive et d’une société inclusive. Certains, donc sans le dire, ou en affirmant de telles contradictions, entretiennent une posture idéologique et politique. Il ne déplait pas à de nombreuses personnes sans doute, de tout faire pour que les bons élèves ne soient pas entravés dans leur progression. Ils préfèrent entretenir un “entre soi” qui ne s’embarrasse pas d’une vision à plus long terme d’une société clivée dont on délaisserait une partie de la population… Ils ne souhaitent pas non plus s’attaquer vraiment aux difficultés réelles que rencontrent l’ école inclusive. D’ailleurs le terme “fourre tout” d’élèves en difficulté  employé dans le discours est significatif.

Cela rappelle d’anciens débats lors de l”industrialisation et de ces bandes de gamins ” assaillant” les villes …. Comment s’en protéger  était la question d’alors ?

Autres idées qui ont germé et se sont développées: les enfants handicapés ont besoin d’une éducation spéciale dans des lieux spéciaux… avec des personnes plus spécialisées. Les associations de parents créatrices de ces projets ont ensuite réalisé la dérive qui en découlait. Couper leurs enfants de l’école, c’était les couper à tout jamais d’une vie sociale et les reléguer dans des lieux “à part”… Comment a-t-on pu penser que mettre ensemble des enfants ayant des troubles du comportement ensemble pouvait leur permettre d’aller mieux ?

Comment peut-on penser aujourd’hui qu’organiser les classes de 6eme/5eme en classes de niveaux pour les enseignements de maths et de français permettraient aux élèves en difficulté de progresser ? Les “à part” spécialisés qui n’existaient plus dans l’école sont entrain de renaitre. Les parents des enfants affectés au groupe des faibles seront ils satisfaits d’une telle mesure?  et quand celle- ci semble s’assouplir en parlant de flexibilité des groupes, nous savons bien que cela ne jouera que pour quelques élèves, que cela produira des “drames” pour des élèves du groupe des “forts” rétro calés dans le groupe des “moyens”

Au delà des questions, voici quelques pistes de réflexion que nous souhaitons partager :

  • La visée d’une école inclusive ne  peut exister sans la vision d’une société inclusive.Or, voulons-nous une société inclusive ? Si le consensus de surface semble être là, tant de contre exemples du quotidien montrent une volonté de préserver les acquis d’une élite et non de  mettre les compétences de ces élites au service de tous.
  • L’école française se débat entre le rêve  d’une école égalitaire  et d’une école élitiste. En fait l’école égalitaire est un mythe car si nous sommes égaux en dignité et en droits, nous faisons l’expérience de l’altérité qui nous montre combien nous sommes différents sur tous les plans constitutifs de l’être humain. Il s’agit de penser une école équitable qui propose à tous des situations où les progrès sont possibles et valorisant.
  • Ne devons-nous pas avoir le souci de former des personnes qui mettront leurs talents au service du bien commun ? Talents dans le domaine conceptuel, relationnel, artistique, visionnaire …  Et aujourd’hui plus qu’auparavant, ces différents talents ont besoin de former une intelligence collective pour résoudre les situations complexes qui se présentent sous forme de dilemmes et de contradictions au prime abord. Si dès le collège , un “tri’ s’opère, comment ces “bons , excellents élèves” apprendront ils à vivre avec des camarades différents ? C’est bien la logique de compétition qui sera poussée à son extrême, or l’école inclusive est une école de la coopération et non de la compétition.
  • Cela renvoie aux théories de l’apprentissage. Apprendre nécessite de se confronter à d’autres représentations, d’autres formulations, d’autres procédures. L’approche socio- constructiviste a-t-elle été comprise ? Est-elle définitivement abandonnée au profit de d’une seule approche cognitiviste, plus mécaniste, s’appuyant sur le fonctionnement du cerveau et qui pourrait prétendre avoir toutes les réponses pédagogiques efficaces ?
  • La différenciation pédagogique  fait partie des gestes professionnels des enseignants. Certes elle ne résout pas tout non plus mais les pratiques enseignantes ont évolué et se sont adaptées , non sans  difficulté, à l’hétérogénéité des élèves dans les classes. Il nous faut aller plus loin maintenant vers l’accessibilité pédagogique et didactique qui permet de repérer les obstacles en amont, de proposer des chemins variés dans la présentation des informations, des moyens d’expression et d’évaluation, de fournir en tenant compte des obstacles des aides utiles à tous.
  • Ce qui entrave ces pratiques différenciées accessibles, c’est avant tout un effectif trop important… La mesure la plus simple serait alors de  limiter les effectifs des classes à 22 et d’accompagner les enseignants dans les pratiques pédagogiques, d’organiser des temps possibles de mutualisation, de recherche commune. Cela renvoie à la question de l’annualisation du temps de travail des enseignants. pourra-ton en faire l’économie?
  • Nous pouvons aussi organiser des groupes  avec un nombre d’élèves moins important. Ce serait une très bonne chose mais en  réfléchissant autrement à l’organisation de ces groupes en fonction des différentes étapes de l’apprentissage en cours. ( temps de découverte, d’entrainement, d’appropriation… )
  •  Comment organiser nos enseignements  en tenant compte à la fois de l’hétérogénéité des élèves ayant le même age, tout en maintenant des exigences , et en répondant à des besoins différents ? Il faut pour cela situer les besoins des élèves  et caractériser des typologies de besoins… Penser des regroupements différents inter âges, pendant cette période collège,  n’ouvrirait-il pas une issue à ces débats stériles d’un autre temps ?

Plutôt que d’imposer des “doctrines” ( mot très à la mode et très significatif) , nous croyons davantage en la responsabilité des équipes, à leur intelligence collective, à leur expertise du quotidien pour trouver des solutions ajustées à leur contexte.

• Nouveau focus ! Vos élèves à BEP et leurs PROGRÈS !

Chacun, chacune, de sa place, de son contexte, de sa vision, de ses convictions définit la réalité qui l’entoure et a tendance à généraliser son point de vue à un ensemble plus vaste.

Ainsi de nombreuses généralités circulent sur l’école inclusive : trop exigeante, pas assez développée, elle nuit aux enfants qui n’ont pas de problèmes, elle modifie le travail des enseignants, les enseignants ne sont pas formés. Et les ministres ainsi que le Conseil Supérieur de l’éducation prônent l’organisation en classe de 6eme et 5eme de classes de niveaux !

Or, depuis 2005, les pratiques inclusives ont beaucoup évolué, transformant  le métier, c’est sûr, mais permettant aussi des parcours d’élèves très différents de ce que nous pouvions imaginer il y a encore 20 ans. De belles trajectoires de vie ont été rendues possibles grâce aux efforts de tous et en particulier par le soin que les enseignants, les équipes avec les parents ont donné à ces élèves différents. C’est une recherche au quotidien pour rendre les chemins d’accès plus faciles qui se fait sans tintamarre médiatique.

Alors il est temps de donner voix à ces réussites, à ces parcours insolites …

Je vous invite donc à témoigner de parcours d’élèves qui sont des réussites pour eux et pour leurs camarades et pour vous aussi, enseignant, l’équipe … IL s’agit de prendre quelques minutes et de regarder ce qui a été proposé, ce qui a progressé, ce que chacun a appris…

Comme le précédent focus, je vous proposerai une analyse des réponses données. Il y a 9 questions en tout… Prévoir 15 minutes.

Merci de votre participation ; n’hésitez pas à transmettre à vos collègues …

 

Répondre au questionnaire

. L’enseignant référent

L’équipe ASH École Inclusive et les enseignants référents des Vosges. Académie Nancy-Metz Hoppé Laurent Sébastien MOUNIÉ Marielle TRABANT Caroline Couturier Lydie Villardo Frédéric Dupré

Proposent un récapitulatif des rôles et missions des enseignants référents pour accompagner les élèves en situation de handicap: flash ASH 88 enseignant référent

Merci à eux.

. Pour l’accessibilité, 3 focales à combiner !

Il semble bien que la question de l’accessibilité pédagogique commence à intéresser de nombreux enseignants ! Tant mieux car il s’agit bien là de sortir des impasses qui reposent seulement sur le versant de la compensation individuelle.

Je vous propose aujourd’hui une infographie interactive qui montre qu’il s’agit de combiner les focales suivantes :

– La focale élève

– la focale activité

– et la focale  Classe

Comme autant de projecteurs à allumer pour mieux mettre en œuvre l’accessibilité des apprentissages pour tous. Chaque focale est accompagnée d’une explication audio et des liens renvoyant à des articles précédents permettent de saisir pleinement la démarche.

. Journée d’études. outils numériques.

Parce que le numérique permet de nombreuses adaptations et favorise une accessibilité des supports d’information et d’expression, notez dans vos agendas la date du 24 AVRIL 2024. L’équipe de l’ORNA vous y invite .

Voir la présentation et les modalités d’inscription “gratuites”. https://www.inshea.fr/fr/content/je2-journ%C3%A9e-d%C3%A9tude-outils-num%C3%A9riques-et-besoins-%C3%A9ducatifs-particuliers

• Co Construire un établissement universel !

Voilà le titre donné au chantier lancé en avril par l’enseignement catholique d’Ille et Vilaine.

Trois termes importants: Co/ Construire/ établissement universel. Le mot chantier évoque bien cette co construction.

Chantier car il réunit de nombreux acteurs aux professionnalités et statuts différents.

Chantier car si la méthode de travail est rigoureuse, c’est en chemin que se dessineront les expérimentations et actions réalisées ou à réaliser.

Chantier avec pour visée deux livrables:

– Créer un établissement universel en se saisissant des opportunités locales de déplacement d’un établissement scolaire et de la volonté commune de travailler avec un IME … Que les équipes de l’IME et du collège forme à terme une équipe… que l’IME soit dans les murs du collège… Que les ressources apportées par l’IME servent aussi à tous.

–  Que les différents établissements du réseau puissent améliorer les pratiques d’accessibilité universelle en s’appuyant sur les travaux menés.

Vous trouverez ci- dessous le dossier de presse réalisé par Thomas Enfin qui explique les visées, la méthode, les thématiques travaillées…

Un grand rendez-vous est donné le 15 mai 2024 sur Rennes qui permettra aux différents groupes ayant travaillé un essaimage mutuel.

    Pour aller plus loin :

Lire la définition de l’établissement universel  Définition qui évoluera certainement mais qui constitue pour les personnes engagées dans le chantier une base commune.

Voir  le dossier de presse

 

Comme quelques expériences sur le territoire, il s’agit là d’anticiper les évolutions à venir et d’oser mettre en œuvre  les recommandations de la Commission Nationale du handicap de 2023, qui promeut de nouvelles modalités de fonctionnement et de travail entre établissements médico- sociaux et établissements scolaires. Au delà des Unités enseignements externalisés, du travail  semble-t-il difficile des EMAS, l’ambition portée est de créer un nouveau modèle d’établissement à partir des ressources existantes. Un IME dans un collège, c’est une équipe autre, un plateau technique sur place et des  évolutions d’organisation et pédagogiques de l’établissement scolaire . A suivre avec intérêt …

• Les troubles neurodéveloppementaux. Qu’en est-il ?

En novembre 2023, le gouvernement publie un guide reprenant la stratégie nationale  pour les troubles du neuro-développement  couvrant la période à venir 2023/2027. Auparavant, cette stratégie nationale concernait les personnes atteintes d’autisme.

Ce changement d’appellation fait référence au concept de  TND  qui s’est “singulièrement affirmé (et s’est imposé en quelques années comme une référence incontournable depuis la mise à jour récente de deux classifications internationales le DSM (version 5) et la CIM(version 11)” . Voir article revue ANAE / N°183Mai 2023.A. Pouhet et M.Cerisier.

Des réactions ont eu lieu à la présentation et publication de cette stratégie, en provenance essentiellement des personnes , associations, soucieuses de la cause de l’autisme, s’inquiétant sans doute d’une moindre prise en compte des besoins spécifiques liés aux troubles du spectre autistique.

Que retenir cependant de ce ce document ?

– Les 6 troubles retenus  . La déficience  intellectuelle prenant la nouvelle appellation de trouble du développement intellectuel.

Des chiffres impressionnants : 1 personne sur 6 est concernée avec une augmentation des taux de prévalence pour l’autisme et les troubles de l’attention ces 20 dernières années ( sans explication satisfaisante ). Comment ne pas s’étonner alors du nombre d’enfants par classe ayant des besoins particuliers ! Certes tous ne sont pas scolarisés en milieu ordinaire. Les raisons de cette augmentation font l’objet de recherches actuelles en particulier en lien avec les facteurs environnementaux. Il convient aussi de remarquer que la plupart du temps une personne peut cumuler un autre TND associé. Dans ce même article cité si- dessus, les auteurs s’inquiétaient d’une inflation de ces diagnostics et de diagnostics multiples  : “Y aurait-il une pression sociale, sociétale en la matière ? … Ce qui interroge la “norme”. Bonne question qui devrait à la fois nous inciter à une observation plus précise et à une moins grande inquiétude quand les développements des enfants sont si variables. Tout simplement, parfois, certains ont besoin de plus de temps !

  • 6 mesures principales sont citées:

 

  • Enfin, une fiche spécifique par type de trouble reprend les mesures générales et détaille les modalités de diagnostic et de prise en charge.

Derrière cette publication, une large concertation a eu lieu. cependant comment ne pas s’interroger sur l’importance donnée au diagnostic médical qui impacte fort nos réalités de classe par rapport à des élèves qui n’ont pas de diagnostic médical mais qui peuvent pour x raisons rencontrer des difficultés dans leurs apprentissages sociaux, relationnels et cognitifs. Le “diagnostic scolaire ” pourrait parfois se passer de diagnostic médical mais interroger les environnements des élèves. Ce ne peut être qu’une incitation de plus à penser l’accessibilité universelle des situations proposées aux élèves.

Consulter le document de la Stratégie nationale TND 2023/2027.

https://www.handicap.gouv.fr/sites/handicap/files/2023-11/DP%20strat%C3%A9gie%20nationale%20TND%202023_2027.pdf