• Au dessus et au delà du tintamarre médiatique…

Dans ce tumulte médiatique et cette impression de chamboulement important, deux des candidats à l’élection présidentielle ont eu quelques mots que je voudrais souligner :

Emmanuel Macron a affirmé que le fait de scolariser des enfants handicapés dans une classe changeait le regard, nous rendait plus intelligent… Oui nous partageons l’idée que la diversité est une richesse et que les enfants différents ont fait progresser l’école, ont toujours conduit à chercher d’autres chemins, d’autres pratiques pédagogiques. Pourtant, l’éducation de tous et la scolarisation demeurent malgré tout fragiles et sans cesse remises en question par les représentations du métier enseignant, de l’apprendre et du handicap.

Plus dernièrement, François Fillon a employé l’expression « je ne suis pas autiste » pour expliquer qu’il ne s’entêtait pas, ne s’enfermait pas. Quelle méconnaissance de tout ce que nous savons aujourd’hui sur les troubles du spectre autistique, toutes les diversités de ces personnes, la richesse de leur fonctionnement, de leurs sensations, des liens surprenants qu’ils font… Il a utilisé une expression courante, dépassée… Cela a valu une réaction de tweets en chaîne qui exprime le scandale, demande des excuses… Les vieilles idées, les vieilles connaissances ont la vie dure et peuvent nous piéger.

Pour autant, quels discours construits, nouveaux, s’appuyant sur toutes les connaissances et les technologies nouvelles entendons -nous, pour parler de l’école, de tous ces laboratoires vivants qui témoignent d’une évolution en cours ?

Il faut pour cela, à la fois une vision qui prenne en compte des décennies de l’histoire de l’éducation, et qui peut regarder d’où nous venons, et une connaissance réelle de ce qui se passe dans la diversité incroyable de tous les établissements, de toutes les classes, de toutes les alchimies uniques liées aux élèves, aux enseignants, aux équipes, au climat et au pilotage d’un établissement. Il faut aussi une vision d’émancipation et d’anticipation choisie et pensée pour tous.

Vision d’évolution et d’émancipation : A quelles peurs non dites la pensée de l’évolution qui permet du développement pour chacun, qui fait grandir les individus et les sociétés se heurte-t-il ? Peur des élites de perdre leurs territoires, leurs pouvoirs ? Peur des individus face au changement ? Incapacité à penser que l’évolution continue, ne s’arrête pas et forcément nous transforme et transforme l’école ?

Vision d’anticipation… Comment inclure maintenant dans nos propres schémas de pensée une école inclusive, ce qu’elle demande, ce qu’elle change déjà et ce qu’elle continuera de changer ? A une époque où la notion de progrès est interrogée, le paradigme de l’école inclusive travaille pourtant à la fois silencieusement mais sûrement de par toutes les situations vécues par les élèves, les enseignants et les parents. Ce paradigme est à la fois signe et source d’évolution pour l’école et nos sociétés.

Quels discours pourraient s’entendre au-dessus des tintamarres actuels qui seraient issus de toutes ces visions, qui donneraient aux acteurs le temps de continuer à expérimenter, de valoriser et mutualiser les pratiques de l’école inclusive, qui permettraient vraiment une évolution? Le temps de l’apprentissage n’est pas celui de l’immédiateté ; le temps de l’éducation n’est pas celui des réformes politiciennes mais bien celui d’une construction profonde d’une humanité en évolution.

Véronique Poutoux, Rédactrice en chef, 7 mars 2017.

• Tout savoir sur le CAPPEI

Après la parution le 16 février du  BO relatif au CAPPEI, certificat d’aptitudes professionnelles aux pratiques d’éducation inclusive, voici 4 documents qui vous permettent de visualiser et repérer les changements importants qui surviennent. Bientôt sur le site une analyse des éléments importants de cette réforme

• Contenus de formation modules d’approfondissement
• Contenus de formation tronc commun
• Organisation épreuves CAPPEI
• Réf ens spécialisé + réf professorat

• Témoignage d’une coordinatrice d’Ulis

Eli Etot nous livre son expérience de coordinatrice d’une Ulis en collège. Elle décrit une Ulis, vraie dispositif, appui, sas pour les jeunes ; elle insiste aussi beaucoup sur le travail conjoint de préparation en amont des inclusions pour bâtir les progressions et donner les aides nécessaires aux élèves pour tirer bénéfice des cours suivis. Son statut d’enseignante de mathématiques est aussi un atout dans cette réussite.

Une belle expérience et de fortes convictions en l’éducabilité des élèves et de ses collègues.

Lire: Une expérience en Ulis

• Dix années de politique inclusive à l’école : quel bilan?

Cet article paru dans Carrefour de l’éducation en novembre 2015, écrit par Émilie Chevallier-Rodrigues et A . Courtinat-Camps dresse un bilan de la politique inclusive. Nous retrouvons bien des éléments mis en avant dans la synthèse que nous avons publiée en septembre 2016 et qui s’´appuyait sur une analyse thématique des 12 entretiens d’acteurs réalisés et publiés sur notre site.

Parmi les convergences, la définition du paradigme inclusif et l’interprétation du passage entre intégration et inclusion; le développement des pratiques de partenariat  et les difficultés rencontrées; la diffusion et mise en oeuvre des adaptations pédagogiques. La notion de besoin éducatif particulier  est analysée dans sa complexité et le flou qu’elle peut générer empêchant certaines comparaisons entre pays et même  dans un seul pays. A signaler les effets des inclusions pour les élèves eux-mêmes. Comme nous l’avons aussi écrit, il faut différencier ce qu’il en est suivant le type de déficience. Pour les élèves à l’école élémentaire, avec un handicap mental, les inclusions ont des effets positifs sur les plans relationnels et cognitifs, de stimulation et d’estime d’eux-mêmes. Pour ce qui concerne le collège et le lycée, les effets sont plus nuancés pour ces mêmes élèves. A l’age de l’adolescence, les écarts se creusent et la question de l’estime de soi est plus fragile; ce qui interroge  les inclusions  telles qu’elles sont conduites actuellement. Des innovations en ce sens sont proposées telle que les inclusions d’élèves »tout venant » dans l’Ulis, les pratiques de tutorat et de coopération à développer…

A lire:

dix années de politique éducative

• La visite: arts et déficience intellectuelle

Un projet prometteur en cours de réalisation pour entrer dans le monde sensible des personnes qui ont une déficience intellectuelle. Ces regards nous diront bien des choses sur leur monde et sur des modalités possibles de développement de leur potentiel.

A voir par tous et plus spécialement pour des enseignants qui travaillent avec des élèves ayant une déficience intellectuelle.

A voir donc :https://vimeo.com/151802900

• Ulis, un dispositif transitoire dans le paradigme de l’école inclusive ?

 Unités localisées pour l’inclusion scolaire :   Qu’en est-il ? Répondent-elles aux besoins des élèves ? Sont-elles propices au développement de l’école inclusive ?

J’ai pu ce trimestre être interpellée à plusieurs reprises par des enseignants qui sont coordinateurs de ces dispositifs, me rendre sur place et constater des fonctionnements plus ou moins difficiles … /…

Finalement, le dispositif Ulis marque sans doute une transition dans l’école inclusive mais continue de générer de fait un lieu étrange, qui a bien du mal à fonctionner de manière vraiment satisfaisante. Ne voulant pas recréer un ghetto, les dispositifs Ulis, pour le moment ne répondent pas suffisamment aux besoins des jeunes mais le peuvent-ils tant que les classes sont organisées par classe d’âge et avec des effectifs trop importants la plupart du temps ?…/

Voir l’article Ulis. VF

 

 

 

• Fin des classes aménagées au sein d’un collège : essai réussi…

Nos traditions et représentations ont conduit une équipe à organiser pour des élèves présentant des difficultés importantes dans les apprentissages,  des classes aménagées, comme des « à part » dans leur collège. Par souci de bien faire, leur proposer une classe plus « cocon » avec une équipe motivée semblait être une réponse intéressante pour répondre aux besoins de ces jeunes et gérer l’hétérogénéité croissante. Après quelques années de fonctionnement, un nouveau questionnement est apparu : le paradigme de l’école inclusive a interrogé ces professeurs ; de plus ces élèves, lors de leur année de 3ème « décrochaient » en quelque sorte. Perte de motivation, pas beaucoup d’envie pour travailler, subissant plus ou moins leur orientation… Alors l’équipe a réfléchi… Voici un premier bilan après un trimestre de fonctionnement autre…
Où il apparait clairement que les motivations sont là, les progrès aussi ; que le tutorat fonctionne… Bref , il est toujours possible de faire évoluer les choses, et cela est intéressant et motivant pour tous !

Début septembre nous nous sommes engagés dans une nouvelle étape pour les élèves qui étaient en classe aménagée.[1] Depuis la rentrée de septembre, ils sont dorénavant inclus dans les classes dites « classiques ». À l’heure actuelle, fin du 1er trimestre, nous sommes en mesure de faire un premier bilan. J’ai rencontré courant novembre chaque élève de 4ème et de 3ème qui était jusqu’à l’année dernière en classe aménagée et les conseils de classe ont eu lieu. Les résultats sont surprenants.

Tout d’abord, les élèves sont satisfaits de ce changement. Leurs craintes avant la rentrée étaient : de ne pas pouvoir suivre le rythme, d’être exclus voire rejetés, de voir leurs résultats chuter, de perdre le peu de confiance qu’ils avaient gagnée.
Rien de tout cela n’est arrivé. Sur 25 élèves en 4ème seul une élève est en grande difficulté. La jeune fille a baissé les bras dès le départ mais les raisons sont d’ordre familial. En 3ème, seuls deux élèves sont en échec. Malheureusement une élève était déjà en échec en 4ème. Une orientation avait été proposée et refusée par la famille. La deuxième est surprenante. Cette jeune fille refuse complètement le changement et reste ancrée dans le passé. Elle refuse même toute aide de la classe. Nous travaillons avec elle et le professeur principal pour qu’elle accepte le changement qui est quelque chose de difficile pour elle même en dehors de l’école.

Pour les autres, ils sont devenus des élèves moteurs et surprennent les autres camarades par leur motivation, leur détermination et leur force de caractère. Ils veulent réussir comme les autres et s’en donnent les moyens. Certains sont les meilleurs éléments de la classe. Les élèves sont un peu admiratifs de cette volonté.

Quant à l’intégration auprès des autres camarades, elle s’est bien déroulée aussi. Les professeurs principaux ont mis en place des binômes afin que les bons élèves prennent en charge les élèves avec un handicap ou une difficulté. Ils sont devenus pour ainsi dire des professeurs particuliers. Toutes les classes ne fonctionnent pas ainsi. Certains professeurs sont réticents à mettre en place ce système. Ils ont peur que la charge soit trop lourde pour un adolescent. La réussite des autres effacera peut-être leur crainte et les poussera à faire de même. Les élèves sont très satisfaits de ce système. Les uns comme les autres apprennent en étant aidés, et en expliquant. D’ailleurs, les élèves des classes où la solidarité n’est pas mise en place trouvent que le rythme n’est pas assez soutenu et ils s’ennuient, alors que les élèves qui expliquent à leur binôme ne s’ennuient jamais.

Néanmoins, il reste une petite bataille à mener. Les anciens élèves de classe aménagée avaient une grande crainte avant la rentrée. Ils craignaient que l’on se moque d’eux. Cette peur est toujours présente , même s’ils n’ont subi aucune moquerie. Cette peur les empêche de participer même quand ils sont sûrs d’avoir la bonne réponse. Nous travaillerons dès la rentrée avec les professeurs principaux sur ce point.

Pour conclure ce premier bilan, même si rien n’est gagné nous restons convaincus des bienfaits pour nos jeunes de ce changement. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir mais avec une bonne dose de bienveillance nous allons réussir.

[1] Élèves rencontrant des difficultés dans leurs apprentissages avec troubles « dys »

• Chiffres clés de l’école. 2015/2016.

« L’état de l’école. 2016 . 30 indicateurs sur le système éducatif français. »  est un document qui paraît chaque année et qui permet de comparer entre autre les chiffres de la scolarisation des élèves en situation de handicap ( Voir p 33 à 38) .

Les élèves nés en 2005 ont bénéficié des avancées de la loi de février 2005, comment sont-ils scolarisés en 2015:2016? 22% d’entre eux sont en CM2; 23% en CM1; 38% en ULIS. Ce qui est à souligner c’est l’écart suivant la déficience de l’élève. Ainsi, 60% des élèves porteurs de troubles intellectuels et cognitifs sont scolarisés en ULIS, alors que 12% des élèves avec des troubles visuels le sont en ULIS.

A noter que les élèves avec des troubles du spectre autistique n’apparaissent pas en tant que tels. Sont-ils comptés dans les troubles psychiques,cognitifs ou autres? Cela est étonnant car il y a une augmentation importante de ces élèves soit en scolarisation individuelle, soit en ULIS.

D’autres données sont intéressantes, en particulier ce qui concerne les compétences des jeunes en lecture, de 17ans, de ceux en fin de collège et de fin d’école.

A consulter donc:
depp-etat-ecole-2016_675134